lundi 9 avril 2007

Harmonium ou Serge Fiori /3e extrait

Mon âge d'or fut le même que celui d'Harmonium. Il y a des choses pires que ça dans la vie vous en conviendrez. J'aimais Harmonium et je l'écoutais sans vraiment savoir que j'avais la chance d'être contemporaine d'un génie musical. Serge Fiori.
Cet homme a écrit de merveilleuses harmonies mais j'étais trop jeune pour le savoir. J'aimais tous les disques d'Harmonium et ça me suffisait.
C'est un peu comme regarder ses vieilles photos et se dire à quel point on était beau et qu'on ne le savait pas. Drôle qu'on ai été toujours plus beau qu'on ne le soit maintenant. Enfin...
Donc, j'écoutais Harmonium et je l'écoute toujours.
Lorsque l'Heptade est apparu dans mon ciel musical j'étais en secondaire V et étais amoureuse ce mois-là de Michel Leboeuf qui demeurait à Chibougameau mais étudiait à la Polyvalente La Forêt parce qu'il jouait au hockey pour les Comètes d'Amos. C'est tu assez précis ça ? :-) Une chance sur un million qu'il me lise.
Nous sommes allé voir l'Heptade ensemble. Expérience transcendentale pour moi, pour lui je l'ignore. Je sais qu'il y avait plein de fumée, celle de la scène et celle du pot. La première me donnant mal au coeur, la seconde n'étant connue de moi que sous forme de fumée secondaire, je gardais donc la tête assez froide pour savoir que je vivais un moment merveilleux et qu'il me fallait en profiter au maximum.
Ce que j'ai fait, la preuve, je me rappelle de tous les détails.
Je me rappelle aussi que la musique encore plus que la fumée secondaire m'avait ensorcelée et bien qu'assez ignorante à l'époque de toutes technicalités musicales, j'étais quand même assez avancée pour goûter pleinement le talent qui s'offrait à moi.
Ce n'est que plus tard que l'homme, le compositeur, m'a intéressé. Comme si, subitement, je prenais conscience que la musique n'était pas que pure magie ni une oeuvre du Saint-Esprit.
Un homme et ses compagnons en étaient les maîtres d'oeuvre.
J'ai vu dernièrement une entrevue avec Serge Fiori qui nous offrait un regard en coulisses sur l'enregistrement de ses plus belles chansons par d'autres artistes. Cela m'a permis encore une fois d'apprécier l'âme de ce muscien. Je crois que si Serge Fiori n'avait pas été si sollicité coté spectacle il aurait pu écrire encore tant de belles choses mais la machine du show bussiness l'a essoré jusqu'à la dernière goutte à un point tel qu'après l'Heptade il ne voyait plus ce qu'il pourrait écrire d'autre.
Il était fatigué, il a arrêté. A écrit pour d'autres, encore de belles choses mais la magie pour moi s'est éteinte avec Harmonium.
Par moment je me dis que certaines choses comme la musique arrivent à me réconcilier avec la bêtise de certaines autres. C'est la plus belle des grâces que l'on ai fait à l'être humain, celle de lui donner le pouvoir de créer la beauté.

Baricco, Océan mer

-Fermez les yeux Barthleboom, et donnez-moi vos mains.
Barthelboom obéit. Et aussitôt il sent sous ses mains le visage de cette femme, et les lèvres qui jouent avec ses doigts, puis le cou mince et la chemise qui s'ouvre, ses mains à elle qui guident les siennes le long de cette peau si chaude et si douce, et les y pressent, pour leur faire sentir les secrets de ce corps inconnu, serrer cette chaleur, puis remonter vers les épaules, dans les cheveux, puis de nouveau entre les lèvres où les doigts vont et viennent doucement jusqu'à ce qu'une voix arrive, qui les arrête, écrivant dans le silence:
-Regardez-moi Bartleboom.
Sa chemise ets descendue sur ses reins. Ses yeux sourient sans aucun embarras.
-Un jour, vous verrez une femme et vous ressentirez tout ça sans même la toucher. Donnez-lui vos lettres, c'est pour elle que vous les avez écrites.
*****************

Un pas, puis un autre pas, jusqu'à être près de lui. Et lui dire:
-Tu ne me feras pas de mal, n'est-ce pas?
Il ne lui fera pas de mal, n'est ce pas?
-Non.
Non.
Alors
Elisewin
prit
entre ses mains
le visage
de cet homme,
et
elle l'embrassa.
Sur les terres de Carewall, cette histoire, les gens ne se lasseraient jamais de la raconter. S'ils la connaissaient. Ils ne s'en lasseraient pas. Chacun à sa manière, mais tous ils continueraient à raconter l'histoire de ces deux-là et de la nuit entière passée à se redonner vie l'un l'autre, avec les lèvres, avec les mains, une jeune fille qui n'a rien vu et un homme qui a vu trop de choses, l'un à l'intérieur de l'autre-le plus petit bout de peau est un voyage, une découverte, un retour- dans la bouche d'Adams pour sentir la saveur du monde, sur le sein d'Elisewin pour l'oublier- au creux de cette nuit bouleversée, tempête obscure, étincelles d'écume dans le noir, les vagues comme des échafaudages qui s'écroulent, le bruit, les rafales sonores, furieuses de sons et de vitesse, lancées sur la croupe de la mer, dans les nerfs du monde, océan mer, colosse ruisselant, bouleversé-soupirs, soupirs dans la gorge d'Elisewin-velours qui vole-soupirs à chaque nouveau pas dans ce monde qui franchit des montagnes jamais vues et des lacs aux formes impensables-sur le ventre d'Adam le poids tout blanc de cette jeune fille qui berce des musiques muettes-qui l'aurait jamais pensé, qu'en embrassant les yeux d'un homme on puisse voir aussi loin- qu'en caressant les jambes d'une jeune fille on puisse courir aussi vite et fuir-fuir loin de tout- voir au loin- tous deux venus des points les plus extrêmes de la vie, c'est ça qui est stupéfiant, et dire qu'ils ne se seraient jamais frôlés sauf en traversant l'univers de bout en bout et qu'ils n'avaient même pas eu besoin de se chercher, c'est ça qui est incroyable, le plus difficile n'avait été que de se reconnaître, se reconnaître, l'espace d'un instant, le premier regard et déjà ils savaient, c'est ça qui est merveilleux-voilà ce que les gens continueraient à raconter, pour toujours sur les terres de Carewall, afin que nul n'oublie qu'on n'est jamais assez loin pour ne pas trouver, jamais-jamais assez loin pour ne pas trouver.....
peut-être que le monde est une blessure et quelqu'un en ce moment la recoud, avec ces deux corps qui s'emmêlent, et ce n'est même pas l'amour, c'est ça qui est stupéfiant, ce sont les mains, la peau, les lèvres, l'étonnement, le sexe, la saveur, la tristesse, peut-être, même la tristesse-le désir- ils tairont le mot amour, tout se tait, autour d'eux, quand Elisewin sent soudain son dos se briser, son âme blanchir, elle serre cet homme en elle, elle lui prend les mains et elle pense: je vais mourir. Elle sent son dos se briser et son âme blanchir, elle serre cet homme en elle, elle lui prend les mains et tu vois, elle ne mourra pas.....

7 commentaires:

Anonyme a dit…

J'imagine que tu dois aimer la musique progressive?

Ce qui arrive à Elisewin me laisse songeur... va-t-il falloit que je lis le livre!?!?! ;-)

bibconfidences a dit…

Hé,hé... Je te ferai un autre petit extrait si tu veux ;-)
Progressive? Je ne sais pas ce que c'est ;-)

Anonyme a dit…

Oui, je le veux! ;-)

Groupe progressif, musique progressive: Rock mélodique dont les pièces musicales sont souvent longues et élaborées, avec de longue envolée musicales et parfois des sons de guitar larmoyant.
Harmonium était considéré comme un groupe progressif a bien des égares. Genesis, King Crimson, Yes et Pink Floyd en sont les pères. Supertramp, Saga et Rush par moment. Aujourd'hui, il y a Marillion, Pendragon, IQ et Popcupine Tree.

J'avoue atteindre le nirvana en écoutant ce genre de musique...

bibconfidences a dit…

Euh, j'aimais Supertramp, je les ai vu deux fois en concert. Une fois au stade, Breakfest in america. Je me souviens, j'avais été malade, pas d'avoir bu ou pris trop de joints mais d'avoir trop mangé de beignes Tim Horton.
Les autres groupes... Pink Floyd trône encore dans ma biblio, Crimson j'aime certaines pièces mais Nirvana? non, pas vraiment...Génésis la même chose, pas toutes les pièces...J'suis bizarre dans mes goûts musicaux.

Anonyme a dit…

Overdose de beignes Tim Horton dans un show de Supertramp ? Il n'y a pas seulement tes goûs musicaux qui sont bizarres! ;-)

Pour Nirvana, je parlais t'atteindre le nirvana en écoutant de la musique progressive, pas atteindre le groupe! :-)
(Sans doute les effets de la fumée secondaire...) ;-)

P.S.: Pour atteindre le nirvana, "Firth of Fifth" de Genesis, on l'atteint de façon assuré à partir de 6:30!

bibconfidences a dit…

C'est qu'en Abitibi à l'époque, nous n'avions pas de beigne Tim Horton tu comprends, alors disons que j'a abusé par gourmandise. :-)
Pourquoi tu n'as pas de blogue, tu as toujours des commentaires tellement intéressants?

Anonyme a dit…

Étant moi-même d'une région dite éloignée, je comprends. :-)

Pour mon blogue, aussitôt que j'aurais le okay de mes procureurs, je m'y mets! ;-)