dimanche 24 juin 2007

Adieu monsieur le professeur

Eh oui, je vais y aller moi aussi de ma fermeture de livre. La page est tournée, une autre année qui vient de se terminer.
Je l'attendais avec impatience, je n'en pouvais plus et pourtant je savais... Je savais que je pleurerais!
Y a rien de pire que de voir un enfant pleurer, imaginez en voir tout un groupe! C'est ce qui m'atttendait dans la cour d'école après le grand décompte. Sur le coup, trop occupée à tracer d'immenses lettres à la craie formant les mots BONNES VACANCES!!! sur le trottoir bordant la sortie je n'ai pas prévu le coup.
C'est après, en les voyant se chercher les uns les autres, puis se tourner vers moi l'air désespéré que j'ai craqué.
J'avais l'air d'une mère en deuil serrant dans ces bras ses enfants survivants de l'holocauste.
C'est vrai que ça ne dure pas longtemps, qu'on se reprend, qu'on est heureuse d'être en vacances, mais croyez-vous vraiment qu'on ne ressente rien à l'idée de ne plus ( dans mon cas je changerai peut-être d'école....) revoir ces petits visages tout chiffonnés de peine? Eux et moi avons pris un an à s'apprivoiser, à se connaître, à s'aimer. Et là, ça y est, c'est fait et il faut déjà se quitter.
Croyez-vous vraiment que ces quelques semaines de vacances sont un luxe pour les professeurs?
Nenon...ces quelques semaines sont un besoin naturel. C'est notre temps de repos mais c'est aussi le temps nécessaire à notre deuil.
Je ne pourrais pas recommencer demain en voyant d'autres enfants prendre la place de ''mes enfants''.
Je ne pourrais pas les aimer, pas tout de suite...
Je dois d'abord me détacher de ceux qui ont vécu avec moi pendant 10 mois jour après jour. Leur travaux, leurs écrits prenant leur place pendant les congés. Leurs pensées et leurs problèmes me réveillant la nuit.
Non, je ne pourrais pas.
En septembre je serai prête à aimer à nouveau. J'en aurai besoin, mon coeur sera prêt.
À tous mes collègues et lecteurs appréciés, bonnes vacances!

7 commentaires:

Gooba a dit…

Quel magnifique texte!!! C'est vrai qu'on a besoin de temps pour cicatriser. Les fins d'année sont toujours difficiles. Même quand on a eu un groupe difficile, on braille comme un bébé.

Anonyme a dit…

J'ai un "remède" aux fins d'années tristes. Bon, c'est vrai, j'enseigne en maternelle, ce n'est pas un remède pour tous...
On fait venir un clown pour la dernière heure. Ils partent le coeur heureux et plein de joie. Et c'est l'image que je veux garder d'eux : souriants, heureux, naïfs... Merci Mr. Clown!

Zoreilles a dit…

Quel texte touchant, Bibco. Des professeures comme vous, j'en ai eu quelques-unes au primaire, elles continuent de guider ma vie, longtemps après que j'aie quitté leur classe.

Au secondaire, seulement 4 ou 5 m'ont fait le même effet.

À l'université, je peux affirmer que la plupart m'ont influencée et continuent de le faire chaque jour.

J'ai eu la chance de le dire à quelques-unes de mes profs du primaire, l'une est aujourd'hui ma tante par alliance, une autre, celle de ma 6e année, m'a révélée à moi-même et orienté ma carrière. La vie nous a réunies 25 ans plus tard dans de très belles circonstances. Elle avait déménagé, moi aussi, elle avait changé de nom pour reprendre son nom de fille mais elle était toujours la même extraordinaire pédagogue très aimante que j'avais connue.

J'ai été touchée qu'elle me reconnaisse, elle a été émue de savoir ce qu'elle avait représenté pour moi. Elle m'a raconté plein de souvenirs à mon sujet, je n'en revenais pas!

bibconfidences a dit…

C'est bon de partager ces émotions avec vous, merci!
Gooba, pour le groupe difficile je me demande si justement on ne pleure pas plus!
Mme. Marâtre, je retiens ce truc!
Zoreilles, ça ne fait que confirmer ce que je pense, dire aux enfants à quel point ils font une différence dans notre vie.
C'est un beau témoignage pour les profs ce que vous m'écrivez, en fait, pour tous les gens qui ont ce rapport d'aidant ou de maître envers leurs semblables.

Anonyme a dit…

Personne ne me fera croire que vous pratiquez un métier, ni même une profession.

Vous êtes enseignante, et cette occupation ne se compare à rien d'autre. C'est une vocation et vous menez toujours à bien vos missions.

C'est la société au grand complet qui s'enrichit de votre oeuvre.

Accent Grave

Le Voyou du Bayou a dit…

En tant que prof, tu feras partie de la nostalgie de tout plein de gens dans 15-20 ans. Lorsque tes jeunes d'aujourd'hui repenseront à leur passé et à ce qu'ils auraient pu être d'autre, probablement qu'il y a aura une partie du temps passé à tes côtés qui sera considéré...

Gooba a dit…

@ La marâtre : Bonne idée. Suis certaine que ça fonctionnerait même en 6e année! ;-)

@ Bibco : Les plus tannants sont souvent les plus attachants, c'est vrai! :-)

@ Accent grave : Ça fait du bien de lire ça... Mais je crois que les infirmières font un boulot qui ressemble au nôtre, côté vocation!

@ Voyou : Je l'espère...