jeudi 7 février 2008

J'ai oyé!

Je m'en tape du redressement de barre de la ministre.
Je m'en tape parce que je fais déjà des dictées toutes les semaines, des dictées en situation d'apprentissage et sans. Je fais déjà de la grammaire tous les matins, ils font des situations d'écriture sous toutes les formes à toutes les semaines et je maîtrise bien mon français. Idem pour mes collègues.
Je m'en tape de tous ces beaux projets parce que dans ma classe j'ai trois élèves dyslexiques, trois élèves TC, trois parents qui m'appellent dès que je donne un mot à l'agenda pour me pomper l'air à propos de l'estime de soi de leur descendance, (ben oui, un beau trium vera hein!) une orthopédagogue merveilleuse qui va faire un burnout si on arrête pas de l'enterrer sous une tonne de paperasses alors qu'elle donne déjà toutes ses périodes libres à nous aider, une directrice qui fait 100 fois plus que son possible pour que son école fonctionne malgré nos 4 classes FA intégrées qui nous régalent de matchs de boxe à toutes les récrés, des évaluations en univers social où je dois évaluer si un enfant de 11 ans distingue bien les différences entre deux territoires et autres inepties qui ne sont pas de son âge, un cours de religion à donner alors qu'on sait que l'an prochain ce sera une autre niaiserie impossible à évaluer, des sciences à évaluer dont le programme pourrait remplir toute ma semaine à toutes les semaines! En fait, si je suivais le programme j'évaluerais tant et tant que je n'enseignerais plus.
Et la cerise sur le sunday, moi je vais faire des efforts pour améliorer la qualité du français dans les écoles où étudient des élèves qui écoutent la télévision d'état et vrak tv ? Avez-vous écouté les émissions pour les jeunes dernièrement ? Aye wow man! Je veux bien améliorer la qualité du français mais ça va prendre pas mal plus que ces mesures mielleuses pour y arriver.
Augmenter le temps de lecture? Balivernes que tout cela! Nos élèves lisent déjà en classe bien plus qu'une fois semaine. L'école est présentement le dernier bastion du français. On ne peut pas miser uniquement sur elle pour changer quelque chose à ce qui se parle au Québec. Langue parlée, langue écrite, tant que le fossé entre ces deux-là sera plus long à traverser que le Rubicon l'école ne pourra se battre qu'à coups d'épée dans l'eau.
Le fait français au Québec relève de tous et chacun. Des parents d'abord, et de tous les autres citoyens ensuite.
Nous demandons à nos enfants des productions écrites dans une langue qu'ils ne parlent pas, même leurs pensées ne se construisent pas dans ce français grammatical que nous leur enseignons.
Je suis lasse de toute cette hypocrisie et de toute cette ouate qui ne cesse de réchauffer jusqu'à la langueur les fonctionnaires de l'éducation.
Aujourd'hui je vais faire des arts. F...le français.

( Okay, ce bout dérape un peu mais je le laisse quand même) Pis à part de ça...le français là...( Oh que je vais me faire haïr...) c'est important pour qui donc? Pourquoi ai-je l'impression que ce sujet est politiquement correct et pas tant que ça un sujet qui tient à coeur à la majorité des gens? C'est ce qui nous définit comme peuple? Ah bon...et les vieux qu'on laisse crever tout seul dans des institutions ça nous définit aussi ça? Et les enfants pauvres qui crèvent de faim? Je ne sais pas pour vous mais moi que je parle anglais ou français je serai toujours la même personne... L'injustice sociale me fera toujours autant chier.

14 commentaires:

Zoreilles a dit…

Je pète ma coche avec toi, Bibco. On vient d'en péter toute une, là!

Dimanche dernier, à la cabane à pêche, comme ça ne mordait pas trop, on jasait. Il y avait deux enseignantes d'expérience et ma fille, étudiante au bac en enseignement du français et qui fait beaucoup de suppléance dans les écoles primaires et secondaires. T'aurais aimé participer, je crois. En tout cas, moi, j'ai aimé les entendre!

Le Voyou du Bayou a dit…

ses vrai que le francais fait dure aujourdhui, surtout su internet...

Par contre, je pense que ça va avec l'âge. J'ai espoir que la majorité et les réalités du marché du travail rendent les lâches un peu plus disciplinés quant à la qualité de leur langage écrit.

Missmath a dit…

J'applaudis ce billet à tout rompre. Cela est vrai pour le français, pour les mathématiques, pour toutes les matières qui distinguent un individu cultivé d'un gros colon.

J'ai terriblement peur de ce qui adviendra de notre société et, contrairement au Voyou du Bayou, je ne crois pas que les réalités du marché du travail rendent les lâches un peu plus disciplinés. Nous manquerons bientôt tellement de personnel qu'il nous faudra nous contenter de n'importe qui et de n'importe quoi.

Gooba a dit…

Lâche-toi lousse ma Bibco! Ça donne un EXCELLENT billet!!! J'ajouterais que je serais capable d'en faire bien plus si on ne me bourrait pas ma classe au maximum et qu'on m'en donnait juste 7-8 de moins (comme la classe que j'avais l'an dernier), je serais capable d'en faire bien plus...

Anonyme a dit…

Juste en passant, pour la prochaine dictée...
http://66.46.185.79/bdl/gabarit_bdl.asp?T1=oyez

Anonyme a dit…

YES! YES! YES!!! Je suis jalouse; c'est un texte que j'aurais voulu écrire! Bibcocotte, tu as parfaitement raison. C'est politiquement rentable d'être chatouilleux sur la langue, sur l'identité, mais au fond, on s'en fout... On voudrait que l'école "élève" nos enfants, pour qu'on puisse se reposer de nos journées de fous. L'école doit enseigner à ma fille à lire, à compter, à écrire et à réfléchir. Pour le reste, c'est ma job de parent, pas celle du prof.
Continue de (à?) t'indigner, cocotte! On doit entendre et lire ça plus souvent.

bibconfidences a dit…

Merci, je me calme le pompon, j'écoute Sunscreen....

Anonyme a dit…

On ne s'en fout pas de la langue, pas moi. Vous non plus. Vous faites votre grande part en ce sens d'ailleurs. La fatigue vous atteint, c'est correct mais ce blues doit cesser mainteant.

En changeant de langue, on n'est plus la même personne ça c'est clair, mais de cela on s'en fout peut-être.

Quelque chose cloche: si on ne maîtrise pas le français parce que ce n'est pas grave et parce que l'anglais nous attire plus, comment se fait-il que l'anglais ne soit pas non plus maîtrisé? Que maîtrise-t-on finalement? Certainement pas notre destinée.

C'est quoi ce «sur place» dans lequel nous nous complaisons au Québec? C'est quoi ces gérémiades? Quel rapport y a-t-il entre la qualité du français, les enfants pauvres et les chiens abandonnés?

Les enfants pauvres n'ont pas besoin de nos complaintes, ils ont besoin d'exemples (comme vous), ils doivent voir ce que c'est que de se battre, avec un bras en moins et une jambe qui traîne. Nos enfants ont d'avantage besoin de voir des adultes souriants, malgré l'adversité.

On a refusé de se donner un pays. On ne se branche sur rien, on a peur de tout et notre génération est tellement peu fière d'elle-même, elle est tellement «chieuse» qu'elle n'ose même pas voir ce qui ne va pas, probablement qu'elle ne veut pas réaliser que ça va pas si mal et que pour améliorer nos vies, il faudrait d'abord souffrir un peu, ce à quoi nous ne sommes pas tellement habitués.

En partant travailler demain matin, prenez quelques minutes et rendez vous sur le bord de la rivière, face à la montagne. Est-ce que tout est si noir?

Accent Grave

Anonyme a dit…

Bibco,

J'appuie Accent Grave, tout en comprenant ton indignation face aux propositions irréalistes de la ministre et faites dans le but de se gagner du capital politique.

Il ne faut pas tout mêler. Ce serait laisser gagner nos gouvernements que de se révolter en bloc contre tout et de capituler.

Ma langue, j'y tiens et je la parle et j'exige que l'on me la parle sinon je ne comprends pas. Je m'adresse aux gens qui ne me parlent pas ma langue comme à des touristes. Je leur demande s'ils sont en vancances ici pour longtemps, aevc le sourire accueillant des gens qui... accueillent volontiers les... visiteurs.

Les gestes de tous les jours. Ceux que tu poses et que d'autres posent aussi, parmi lesquels des parents, oui. Tous ne sont pas à mettre dans le même panier.

Oui, tu fais déjà beaucoup pour le français, nonobstant les règles de la Réforme.

De même que pour la Réforme, il faut construire un projet de pays si on veut vraiment un pays, et une nouvelle plateforme d'enseignement primaire ET secondaire si on veut une école plus efficace.

Trop de gens ici prennent les moyens pour les buts, les objectifs. Comme ce nouveau parti qui propose de faire, après qu'il ait été élu, l'indépendance du Québec. Avec quoi, dans ce pays? Mystère et boule de gomme. De quelle manière? Aucune idée. Dans qel but? Bien le but, c'est... euh... le moyen.

Qu'y a t-il, dans le système d'éducation, si on élimine tout de go la Réforme? Est-ce qe les débats ont réellement été faits? Sur les valeurs socilaes, il est clair que non. Sur le reste, les débats sur le quoi, comment, pourquoi, etc. sont-ils plus avancés que d'autres, dans vos milieux (primaire et secondaire)? Je ne sais pas, il me semble que non.

Puis-je te suggérer d'aller lire l'excellent billet de Professeur masqué, qui fait une critique très étoffée et nuancée des propositions de la ministre?

Moi-même, je la critique parce que ce qui saute d'abord aux yeux, c'est le poivre de cayenne qu'elle lance aux yeux, mais sur le fond, je l'ai dit ailleurs, il faut que l'on se penche sur ce que l'on veut. Arrêter de rejeter ce qu'on ne veut pas et proposer.

Je ne suis pas du milieu, mais je me sens drôlement concernée parce que je suis membre à part entière de cette société et que la soctété, tu sais quand on dit « Ils font ci ou ça... », bien la société, c'est nous, donc, c'est moi aussi.

Tant qu'on ne proposera pas, les décideurs, les gouvernements décideront à notre place, et cela, à vue de nez, ce que dure le temps entre deux périodes électorales, avec comme objectifs, teintant toutes les décisions, de garder leur pouvoir aux prochaines.

Prends une bonne respiration et poursuis ton bon travail, Bibco! Tu n'es pas toute seule à être tannée, outrée et tout. Mais il faut apprendre à débattre et construire nos projets, selon moi.

Courage!

Zed ;-)

bibconfidences a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
bibconfidences a dit…

Et j'ajouterais aussi qu'une vieille personne c'est une racine vivante, autant qu'une langue si noble soit-elle. Je connais une femme qui parle plus français qu'une parisienne, chiante comme c'est pas possible, qui me rabat les oreilles sur l'importance du français, de nos racines françaises et de Versailles... Cette femme si prompte à défendre ses racines ne juge pas bon de visiter ses parents avec son fils de 8 ans qui pourtant habite à 1km de chez elle. Pas le temps dit-elle. Mais son fils parle très bien le français, il développe sa racine de la langue y a pas à dire. Mais il ne connaît pas ses grands-parents ou si peu.
Ce sont de telles situations qui me font dire que certaines personnes se font une belle image avec la cause du français mais la racine pour survivre doit avoir un sol généreux. Je mêle tout mais j'suis comme ça. Je ne suis surtout pas spécialiste, je ne détiens pas la vérité, je ne fais qu'écrire ce que je pense et ce en quoi je crois. Amen.

Anonyme a dit…

Bibco,

la première phrase de Voyou m'a fait sourire, car son français écrit habituel est impeccable, sans fautes d'orthographe, et c'est vrai que sur internet les fôtes sont nombreuses.

Tout le monde fait des fautes, causées par la fatigue ou l'inattention, mais j'enrage de lire les écrits de certains universitaires (bourrés de fautes de toutes sortes), alors que seul mon amour de la lecture m'a enseigné à écrire correctement,en espérant ne pas faire trop de fautes, de syntaxe ou de grammaire.

Le milieu enseignant est difficile, et je crois qu'il suffit seulement de quelques personnes pour faire la différence, entre le désir d'apprendre ou le subir. Votre travail est important, il ne faut jamais le sous-estimer!

Gooba a dit…

Accent Grave, la réalité de nos classe a des répercussions certaines sur notre capacité à transmettre nos connaissances en français.

Comme le souligne Bibco, un enfant qui a le ventre vide apprend moins bien, il manque de concentration.

Dans une classe où il y a 30 élèves, on a moins de temps que dans une classe où il y en 20.

Si ces 30 étaient sages, je dis pas. Mais ce n'est pas la réalité actuelle. On a des élèves intégrés. On a des élèves de tous les niveaux, même si on n'a pas de classe "multi". Il y a deux ans, dans ma classe de 6e année, j'avais des élèves de niveau fin 1re année à niveau secondaire 1. Quelques troubles de comportement pour pimenter le mélange. Et des parents chiâleux en tant que cerise sur le sundae.

C'est mathématique. Si je passe du temps à gérer des comportements inadéquats (et on ne parle pas d'une bêtise par semaine, on parle d'enfant capable de désorganiser un groupe entier), si je passe du temps à revoir des notions qui auraient dû être assimilées depuis belle lurette, si je passe du temps à répondre à des parents qui ne semblent avoir aucun autre loisir que de faire chier le prof de leur enfant, ben j'ai moins de temps pour préparer mon enseignement et moins de temps pour enseigner.

La qualité du français passe par là, aussi. Donnez-moi une classe de 19-20 élèves et je vais presque faire un miracle. :o)

Il y a des moments où je suis découragée, des moments où je corrige leurs textes en me demandant pourquoi je prends la peine de répéter 1000 fois la même règle en espérant que ça leur rentre dans le cerveau. Mais ça ne veut pas dire que je lâche... C'est juste qu'à certains moments, devant la bêtise et devant l'ampleur, la soupape saute... Normal, à mon avis! :o)

bibconfidences a dit…

La ministre me parle d'une réalité qui n'est pas la mienne. C'est bien plus facile pour elle de mettre en place ces mesures que de s'attaquer aux vrais problèmes. Les vrais problèmes? 30 enfants par classe, sur ces trentes enfants au moins 6 qui devraient avoir un soutien direct et spécial.
Apprendre la grammaire quand on a aucun carburant dans le cerveau? Essayez jour après jour d'aller travailler sans déjeuner. C'est vrai qu'eux en plus tentent de se construirent un corps. Ne pas tout mêler? Impossible, si la base n'est pas solide, l'échafaud s'écroule.
Non, je maintiens; la langue telle que l'on tente de la retrouver sera absente ou alors nous n'aurons qu'un petit nombre d'enfants qui y parviendront.
Je ne baisse pas les bras, je n'y crois pas, c'est différent. On va faire de beaux programmes, tenter de mettre ça sur le dos de la réforme, jeter les nouveaux livres en imprimer d'autres, imprimer de nouveaux bulletins. Et puis?
Rien.
Elle fonctionne la réforme en Finlande. Ratio prof/élèves? 1/18.
Que la ministre engage des profs, qu'on mette en place un club des petits déjeuners dans chaque école, qu'on construise des services de garde EN DEHORS de l'école, voilà des mesures qui me permettraient d'enseigner efficacement. Le seul point qui me touche vraiment c'est la formation des maîtres. Je suis pour ... Pour une culture plus étendue et un français impeccable. Je serais la première à mettre mon nom sur la liste d'inscription à ces formations.
Je ne peux pas appliquer les opinions du professeur masqué à ma réalité. Primaire et secondaire sont deux mondes.
Pour ce qui est du français comme identité je me tais, je passe mon temps à me coltiner là-dessus avec l'élu, j'ai d'autres idées que lui et que vous.
Ce qui n'empêche pas que quelle que soit la langue que l'on utilise elle mérite de l'être bien.
Je n'ai pas le temps d'aller voir la montagne ce matin cher Accent Grave,
Le courage ne me manque pas, c'est l'indignation et la frustration qui grugent ma mèche.
Je terminerai en disant que si on échangeait un fonctionnaire du ministère de l'éducation pour un prof le monde scolaire n'aurait pas besoin de nouvelles mesures.